Je me tourne les pouces. J’habite
le quartier le plus intéressant et historique de la ville et j’arrive à me
tourner les pouces alors que nous sommes samedi et qu’il fait 22°C dehors avec
un soleil radieux. Je suis impossible. Je tourne en rond.
Je me réjouissais d’atterrir
ce printemps dans le quartier St-Jean-Baptiste à Québec. Les non-résidents et
non-touristes devront s’imaginer le Plateau Mont-Royal dans les années 90 du
siècle dernier ou SoHo dans les années ’60. La bibliothèque néo gothique, où je
me trouve présentement, est un ancien temple protestant et entourée d’un
magnifique parc, d’un vieux cimetière et de punks. Le Drague, un bar gay,
est son voisin immédiat et juste derrière se trouve le centre des congrès de
Québec. S’il est toujours résident des Tours Saint-Jean le grand écrivain québécois
Jacques Poulin est un voisin de ruelle.
S’il fait beau, chaud et
touristique, il est pratiquement impossible de se promener tranquille. On
reconnaît le résident du quartier à sa débandade vers les rues attenantes à la
Saint-Jean-Baptiste pour vaquer à leurs occupations quotidiennes. Je vois alors
mes voisins déambuler tranquillement sur les rues Richelieu, D’Aiguillon,
St-Olivier et De La Tourelle dès qu’il fait plus de 15°C avec soleil. Les
natifs pestent en cœur contre les envahisseurs de la banlieue et se saluent d’un
« Stidtouriss » et d’un sourire en coin accompagné d’un signe de la
tête.
L’Homme est à la campagne loin loin, plus loin que loin, dans sa maison nouvellement achetée et je me retrouve seule à Québec à tuer le
temps. La journée est magnifique et le printemps fut tardif. Demeurer dans mon
petit appart’ serait un sacrilège. Depuis son départ matinal après un café
marmotte, des pâtisseries, un mini déménagement et de belles embrassades en
pleine rue, j’assassine le temps en trois étapes faciles.
Étape
première : Je tente le diable, sans le savoir parce que
j’ai un déficit d’attention, et je sors avec de l’argent dans les poches pour
aller vérifier l’horaire d’ouverture de la bibliothèque. Je reviens avec une
robe d’une fantastique créatrice québécoise et trois bagues d’argent achetée
dans une boutique médiévale à 1km de la bibli’.
Étape
seconde : Prendre une autre petite marche, après avoir
déposé mon sac chez moi, mais cette fois-ci sans portefeuilles : parce que
j’ai beau être une déficitaire attentionnée, je ne suis ni riche, ni stupide. J’ai
alors constaté l’augmentation du quota d’étranges sur la rue et qu’aux regards
insistants des hommes et aux airs bête des femmes, mes nouveaux vêtements m’allaient
très bien. Ce ne sont pas ceux que je me suis procurés aujourd’hui, mais bien
ceux adoptés avant-hier parce que j’avais faim et que je suis passée devant une
boutique Goth avant d’arriver à l’épicerie.
Étape
troisième : J’arrive à passer les portes de la bibli’
sans céder aux livres usagés en solde juste en face. Je jette un coup d’œil au
contenu des tablettes : rien de nouveau. Je cherche l’inspiration. Je m’attable
et je prends possession de mon territoire. Lire ici : j’étends mes affaires
à la grandeur de la table pour ne pas attirer le prédateur de blogueuse.
Le prédateur de blogueuse
est un être ignoble et libidineux. Il s’assit en face ou en diagonale d’une
blogueuse et la reluque du coin de l’œil. C’est intensément énervant. C’est
comme lire à deux. La proximité des corps et des esprits m’empêchent de m’enfermer
dans une bulle et de rêver. Pour créer ou lire, la solitude m’est nécessaire.
Aujourd’hui ça va : ne sont attablées que des femmes et elles me font dos.
Alors, voilà. Je suis ici et
je ne sais pas sur quoi j’écrirai.
J’ai un blanc...
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